TIFF 25 - Pietro Marcello ranime la flamme d’Eleonora Duse
Avec « Duse », Pietro Marcello, signe un portrait ambitieux d’Eleonora Duse immense, figure du théâtre italien, interprétée par Valeria Bruni-Tedeschi, qui est incandescente dans ce rôle. Présenté à la Mostra de Venise, puis au TIFF, le film explore la dernière partie de la vie de l’artiste Eleonora Duse marquée par le poids des années, la maladie, mais aussi par le désir indéfectible de remonter sur scène dans une Italie fragilisée par la guerre et menacée par l’ombre du fascisme.
Valeria Bruni-Tedeschi livre une performance habitée. Elle réussit à traduire à la fois la fragilité du corps et la force de l’esprit, incarnant une Duse fatiguée, mais toujours brûlante de passion. C’est une femme qui refuse de se laisser réduire au silence et qui transforme son art en ultime forme de résistance.
À ses côtés, Noémie Merlant offre une présence subtile et captivante. Son jeu tout en nuance apporte un contrepoint essentiel à la flamboyance de Valeria Bruni-Tedeschi. Là où Valeria Bruni-Tedeschi déploie l’intensité, Noémie Merlant distille retenue et précision, créant une tension fertile à l’écran. Leur duo parfois dans la confrontation, parfois dans la complicité, constitue l’un des plus beaux ressorts dramatiques du film.
Pietro Marcello ose une mise en scène, hybride, entre images d’archives, reconstitution et fragments quasi théâtraux. Cette audace esthétique confère au film une auro singulière presque spectrale. Pourtant, cette ambition se retourne parfois contre lui. Le récit s’étire sur plus de deux heures, au risque de perdre son intensité. Certaines séquences cèdent au pathos, multipliant les cris et les éclats au détriment de l’intime, alors que c’est dans les silences que le film trouve sa force.
Malgré ses déséquilibres, Duse réussit à ranimer la mémoire d’une artiste majeure. Plus qu’un simple biopic, le film interroge le rôle de l’art, en temps de crise : comment continuer à créer, à parler-vrai, quand le monde bascule vers l’autoritarisme ?
Entre la puissance tragique de Valéria Bruni-Tedeschi et la grâce moderne de Noémie Merlant, Duse propose une réflexion vibrante sur la transmission et l’engagement artistique. Un film imparfait, parfois trop appuyé, mais traversé de beauté, qui en fait un hommage digne à une figure oubliée du théâtre.
Chronique : Quitterie Hervouet
Crédits photo: TIFF
Crédits photo: TIFF
